LE REPORT DES CONGES NON PRIS
La Cour de Cassation a, par deux décisions datées du 24 février 2009, aligné sa jurisprudence sur celle du juge communautaire1 : lorsque le salarié s'est trouvé dans l'impossibilité de prendre ses congés payés annuels au cours de l'année en raison d'absences liées à une maladie, un accident du travail ou une maladie professionnelle, les congés payés acquis ne sont plus perdus mais doivent être reportés après la date de reprise du travail.
LA REGLE : UN DROIT QUI S'EXERCE
EN PRINCIPE CHAQUE ANNEE
"Tout salarié a droit chaque année à un congé payé à la charge de l'employeur", prévoit l'article L 3141-1 du Code du Travail. En dehors de quelques exceptions légales (par exemple lorsque la durée du travail et annualisée ou pour les salariés de retour de congé de maternité ou d'adoption), ce droit s'exerce en principe chaque année, sans possibilité de reporter d'une année sur l'autre les congés qui n'ont pas été pris.
Nul texte ne prévoyant un tel report en cas de maladie, d'accident du travail ou de maladie professionnelle, la Cour de Cassation avait l'habitude de juger que le salarié perdait les congés qu'il n'avait pu prendre dans l'année (ou l'indemnité de congés payés équivalente) du fait de son absence2.
L'APPORT DU DROIT
COMMUNAUTAIRE
Pour la CJCE3, le droit aux congés payés constitue "un principe du droit social communautaire revêtant une importance particulière auquel il ne saurait être dérogé4". Et parce que congé maladie et congé payé annuel répondent à des logiques différents, il n'y a pas de raison pour que l'exercice de l'un prive du bénéfice de l'autre.
Ainsi, le droit communautaire impose que les Etats garantissent de manière effective le droit au repos, que le salarié ait été absent pour maladie ou non. Le droit français ne peut donc pas prévoir l'extinction du droit à congé au-delà d'une certaine période5. La Cour relève que si "l'effet positif [du congé payé annuel] pour la sécurité et la santé du travail se déploie pleinement s'il est pris dans l'année prévue à cet effet, à savoir l'année en cours, (…) toutefois ce temps de repos ne perd pas son intérêt à cet égard s'il est pris au cours d'une période ultérieure". Ainsi, pour la CJCE, même pris des années après, il peut quand même "contribuer à la sécurité et la santé du travailleur"6.
UN PREMIER PAS DE LA COUR DE
CASSATION... PUIS UN SECOND
La Cour de Cassation s'est alignée sur le juge communautaire en deux temps : fin 2077 tout d'abord, elle avait jugé que le salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle a droit au report des congés payés non pris7.
Puis, début 2009, elle a élargi cette solution à tout salarié qui "s'est trouvé dans l'impossibilité de prendre ses congés annuels au cours de l'année (…) en raison d'absences liées à une maladie ou un accident du travail ou une maladie professionnelle"8. En outre, si le contrat de travail a pris fin, le salarié qui n'a pas été en mesure de prendre ses congés a droit à une indemnité compensatrice9.
VERS D'AUTRES POSSIBILITES DE
REPORT
DES CONGES ?
Le droit au report des congés, pour l'instant limité aux seules absences pour raisons médicales, pourrait-il être étendu à d'autres causes d'absences, en dehors de celles prévues par la loi ? Pour l'instant, les décisions de la CJCE ont été rendues à propose de "travailleurs en congé de maladie dûment prescrit"10, donc involontairement privés de leur congé annuel. S'agira-t-il à l'avenir, du seul critère déterminant ?
1L'autorité judiciaire de l'Union européenne est la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE). Elle siège à Luxembourg.
2Exemples : Cour de cassation, Chambre sociale, 28/09/2005, n°03-46.613 ou 13/01/1998, n°95-40.226.
3Qui interprète la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003.
4CJCE, 6 avril 2006, affaire C-124/05, point 28.
5CJCE, 20 janvier 2009, affaire C-350/06 et 520/05.
6CJCE, 6 avril 2006, points 30 et 31.
7Cour de cassation, Chambre sociale, 27 septembre 2007, n°05/42.296.
8Cour de cassation, Chambre sociale, 24 février 2009, n°07/44.488.
9Cour de cassation, Chambre sociale, 24 février 2009, n°07/43.479.
10CJCE 20 janvier 2009, affaire C-350/06 et C-520/06,
point 41.
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